Dinner in The Sky à la Basilique de Koekelberg (Bruxelles) avec David Martin.
Dinner in the Sky est un concept qui a été elancé il y a quelques années par David Ghysels. Un pari un peu fou : installer une table gastronomique à 50 mètres de hauteur suspendue à une grue. Je me souviens encore de mes sentiments mitigés à l’époque. Je trouvais l’idée originale mais je me demandais bien comment on pouvait envoyer des assiettes de qualité dans de telles conditions. Et surtout, malgré l’une ou l’autre grande star chef, je trouvais que le niveau culinaire des chefs avait de nettes marges d’amélioration . Quand on vise une expérience hors-norme, il faut le faire jusqu’au bout.
Mais, sauf à être un riche rentier qui investit pour se divertir sans soucis du ROI (return on investment), ce genre d’événement se construit au fil des ans. David Ghysels a donc eu non seulement l’idée géniale. Mais il avait aussi l’esprit entrepreneurial pour la développer.
Dinner in The Sky, un concept international
Maintenant, le concept Dinner In The Sky se décline dans le monde entier (comme quoi ils ont bien fait de choisir l’anglais comme nom de concept). Ce ne sont pas des mots : quand je parle du monde entier, je ne parle pas d’un événement satellite juste pour pouvoir accoler le mot pompeux d »international » à l’événement. Je parle d’un véritable engouement et d’un grand nombre de repas un peu partout sur terre. On a ainsi vu des grues « Dinner In The Sky » à Sydney, Toronto, Rio, Monaco,…
Le niveau des chefs, qui cuisinent sur les nacelles, est également devenu impressionnant. A l’international, on a des stars comme Joël Robuchon, Pierre Gagnaire et encore mon chouchou Alain Passard. Pour l’événement qui se déroule pour l’instant à la Basilique de Koekelberg, les chefs sélectionnés sont des chefs étoilés (à l’exception d’une personne qui fût étoilée et qui, je prends le pari, le sera à nouveau en novembre 2018) :
- Yves Mattagne du Sea Grill**
- Filip Claeys du De Jonkman**
- Bart De Pooter du De Pastorale**
- Alexandre Dionisio de La Villa in the Sky**
- Viki Geunes du ’t Zilte**
- David Martin de La Paix*
- Giovanni Bruno du Senzanome*
- Lugi Ciciriello de La Truffe Noire*
- Gary Kirchens de La Villa Lorraine*
- Mathieu Jacri de la Villa Emily*
- Karen Torosyan de Bozar Restaurant*
- Alain Bianchin de Alain Bianchin*
- Isabelle Arpin du Louise 345
L’expérience Dinner in The Sky
Dinner In The Sky peut difficilement se résumer à un repas dans les airs. C’est plus que cela. C’est une expérience globale.
L’accueil est très soigné avec des espaces intérieurs et extérieurs permettant de décompresser avant la montée.
Et surtout, il y a de quoi se préparer festivement au repas tout en oubliant la hauteur pour ceux qui ont le vertige :
On peut aussi se balader au pied des grues et constater les nombreux préparatifs (notamment de sécurité) qu’un tel événement requiert.
Le départ de la montée Dinner in The Sky
L’expérience débute par un bref exposé en français et en néerlandais. Chaque convive est ensuite installé et attaché sur sa chaise (le mot attaché est le mot exact : impossible de tomber ni de se détacher par soi-même, sécurité oblige).
Une fois tout le monde bien arnaché, en ce compris le chef, son équipe et même deux journalistes de BX1, un décompte s’enclenche ainsi qu’une animation pyrotechnique. Ca y est, une lente envolée débute.
Le repas dans les airs dure 1h30. Une durée largement suffisante pour s’acclimater, pour profiter de la vue et pour ne pas devoir satisfaire de besoin urgent 🙂
La grue monte à 50 mètres de hauteur, ce qui permet une belle vue dégagée sur Bruxelles
La nacelle s’avère très stable : elle est bien pensée et ne tangue pas. Mais, au gré du vent, elle tourne lentement sur elle-même, ce qui permet vraiment d’avoir une vue à 360°.
Les vins à Dinner In The Sky
Tous les goûts sont dans la nature. C’est encore plus vrai dans le monde du vin. Il y en a qui aimeront le Bordeaux, d’autre le Bourgogne,….et finalement toutes les régions trouvent leurs fans.
Je suis personnellement un grand amoureux de la Bourgogne de par sa finesse, une finesse que je n’ai jamais pu retrouver ailleurs. Mais, si on m’avait servi un grand Bourgogne à Dinner In The Sky, je n’aurais pas pu l’apprécier. De la même manière qu’on doit penser son menu, il faut penser le vin. Là où un vin blanc sudiste à base de grenache (blanc et gris si mes souvenirs sont bons) pourrait apparaître à priori trop riche au sol sur un dorade kobujimé, c’est paradoxalement un choix pertinent en altitude. Sous le vent, les arômes se dispersent et les perceptions s’atténuent. Un vin riche s’assagit donc et passe merveilleusement bien.
Les assiettes de David Martin à Dinner In The Sky
David Martin, c’est un de mes chefs favoris. C’est très sincère et vérifiable : il figure dans mon top 10 des favoris. C’est un génie qui est en avance sur le temps. J’en discutais encore la semaine passée avec un ami. Le plus beau repas de 2017 que lui et moi avons fait, c’est à La Paix.
Mais, à Dinner In The Sky, les choses sont différentes. Il n’y a pas de frigo, ce qui implique que la grue doit redescendre avant le dessert pour récupérer la glace qui le compose. Le chaud se révèle un véritable challenge. Et le dressage, surtout lorsqu’on râpe finement un fromage, se révèle un fameux défi à relever lorsque le vent est présent.
Heureusement, les chefs ne sont pas des novices. Ils connaissent la complexité et pensent le menu en fonction. La part belle est faite aux préparations froides bien entendu et l’expérience de David Martin (avec son inspiration japonaise) s’avère payante. Il nous a ainsi régalé d’une magnifique dorade royale en méthode kobujimé (le poisson est enveloppé trois jours dans des feuilles de kombu, ce qui permet d’avoir la texture d’un poisson salé mais sans l’usage du sel et ce qui permet de lui donner l’umami et le goût du kombu). Le même poisson est également travaillé en tartare, ce qui permet d’apprécier différentes approches d’un même produit, les deux étant intéressantes.
Le petit truc en plus à Dinner In The Sky
Sur les assiettes, je pense qu’il y a une réflexion encore plus profonde que celle de favoriser les entrées froides. Le chef a probablement réfléchi longuement au meilleur moyen de contrebalancer le vent et la dispersion accrue des arômes. Je pense que le secret est d’accentuer les assaisonnements et certaines saveurs comme l’acidité. Des plats qui pourraient paraître trop poussés dans une salle cosy deviennent, de par les conditions, des plats impeccables et avec beaucoup de peps (mais pas trop).
Bien sûr, on ne peut pas faire de miracle non plus. On ne mange pas au même niveau dans le restaurant du chef qu’à Dinner In The Sky. Mais, et c’est très important à souligner, le chef n’est pas là pour faire de la figuration et le niveau qu’il atteint force une certaine forme de respect. Et puis, et surtout même, Dinner In The Sky, c’est plus que des assiettes.
Dinner In The Sky, ce ne sont pas que des assiettes.
Ce qui différencie un repas à Dinner In The Sky d’un autre repas, c’est la globalité de l’expérience hors norme. C’est un tout qu’on doit analyser ensemble. Cela ne sera pas les meilleures assiettes de votre vie. Sans doute que vous ne boirez pas non plus les meilleurs vins de votre vie. Mais cela sera peut-être la plus belle vue que vous ayez vue assis à table. Et, enfin, cela sera peut-être l’expérience la plus dépaysante et la plus conviviale que vous ayez vécu.
Il y a un autre aspect, peut-être le plus important après la vue, qu’on ne voit pas de suite : c’est la convivialité, la bonne humeur et surtout l’accessibilité du chef. Quelques privilégiés (et j’avoue que cela m’arrive parfois) vont parfois en cuisine voir ce qu’il se passe. C’est un moment assez intense d’échange avec l’équipe, le chef en premier bien évidemment. Ici, à Dinner In The Sky, le chef est devant vous, tout nu (au sens figuré bien sur) et accessible. Le contact peut donc s’établir bien plus facilement qu’il ne se ferait au restaurant et c’est aussi cela Dinner In The Sky.
Conclusions
L’événement de la basilique de Koekelberg se déroulera du 11 au 24 juin 2018. Les réservations sont possibles sur leur site web : http://www.dinnerinthesky.be/book/reservation-2018.php.
Le prix de l’expérience est à la hauteur de l’exclusivité : 285 euros. Mais cela ne constitue en rien un frein puisqu’il n’y a déjà quasiment plus de places. Le succès est au rendez-vous et David Ghysels a réussi son pari un peu fou. Monter à Dinner In The Sky, c’est vivre un moment surréaliste, à la belge donc. L’expérience globale est unique et c’est cela qui marque et qu’on retient.
Lien vers le site web de Dinner In The Sky
http://www.dinnerinthesky.be/fr/
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