Restaurant La Table du Boucher, à Mons, par Luc Broutard.
La Table du Boucher, c’est avant tout et surtout la Table de Luc Broutard, le chef serial-entrepreneur qui compte à son actif un beau palmarès de restaurants (dont l’étoilé Le Comptoir de Marie ou encore son petit dernier : La Banque à Mons).
Je ne connais pas tous les restaurants de Luc Broutard pour une simple et bonne raison : La Table du Boucher me plait énormément et c’est sans cesse là que je retourne. La marque de fabrique correspond à mes attentes. La Table du Boucher, c’est le restaurant qu’on choisit pour la viande grand cru. Le chef, Luc Broutard, a développé une grande expertise au fil du temps. Il choisit ses races bovines et les affine dans ses chambres de maturation. Il est devenu à ce point une référence qu’il fournit même quelques restaurants haut de gamme. Comme on n’a rien à cacher à la Table du Boucher, on voit quelques unes de ces belles pièces dans un frigo ainsi que le grill à charbon où on les cuit.
Les prix à La Table du Boucher
Ce que je trouve sympa à la Table du Boucher, c’est qu’il y en a pour tous les goûts et tous les prix. Il y a tout d’abord l’excellent rapport qualité-prix du menu Michelin BIB Gourmand à 37 euros. Ce menu permet d’appréhender la cuisine du chef sans se ruiner.
Si vous ne voulez pas casser la tirelire, ce menu est parfait. Je conseille toutefois, très très fortement, l’option entrecôte de boeuf Holstein maturée car c’est vraiment le cheval de bataille de la maison (j’aurais du écrire boeuf de bataille en fait) et ne pas la gouûer serait passer à côté d’un plat signature.
Les plats d’exceptions
Et puis, quand on est bien convaincu (comme moi), on passe à la carte où s’étalent les pépites de Luc Broutard.
On entre dans un autre budget, comme avec ce caviar impérial sur son tartare de bœuf de Salers (45 euros). Mais on passe aussi dans la catégorie supérieure du point de vue qualitatif.
Un tel plat peut paraître simple visuellement et l’idée, d’associer du boeuf et du caviar est connue depuis longtemps. Mais cela fonctionne admirablement bien.
On sait tous qu’il y caviar et caviar. Mais on se doute moins que, dans un plat comme celui-ci, il y a boeuf et boeuf. Le chef aurait pu prendre de la Holstein, race qu’il sert en côte à l’os grillée, mais cette viande est trop grasse quand elle est préparée en tartare. Il préfère dès lors travailler la Salers. Il faut ensuite trouver la bonne taille pour le hachage afin d’obtenir un grain noble en bouche : ce ne doit être ni trop fin ni trop gros.
Ce plat demande donc deux beaux produits (et qui dit beau en cuisine, dit coûteux) et quelques expérimentations aussi aussi pour trouver le bon équilibre. En parlant d’équilibre, il faut aussi souligner le parfait assaisonnement requis pour que l’accord soit à son top.
Une variante de cet accord est aussi proposé au travers du carpaccio de boeuf Holstein, poutargue de caviar et huile d’olive extra vierge. Ce carpaccio est divin. L’ensemble était un rien trop salé à mon goût (je pense que la poutargue de caviar sale suffisamment et qu’ajouter du sel n’est pas nécessaire) mais l’idée est excellente et le plaisir bien présent.
La carte des vins
Pour la carte des vins, c’est le même principe. Structurée par couleur et puis par ordre croissant de prix, les premières bouteilles sont proposées à 25 euros. Comme quoi, les prix sont cohérents à la Table du Boucher car des vins chers à côté d’un menu BIB Gourmand à 37 euros, cela aurait dénoté.
Pour ceux qui veulent des vins supérieurs, cela monte graduellement en qualité comme en prix.
Je qualifierais cette carte des vins comme une carte des vins généraliste. Il y a du choix et il y en a pour tous les prix. Ce n’est pas une carte pointue mais c’est cohérent avec le concept de brasserie et l’absence de sommelier. Les prix demeurent eux aussi dans la norme habituelle du X3-X4.
A noter, le restaurant propose une carte des digestifs très sympas avec quelques beaux armagnacs assez vieux.
Les bouteilles sont d’ailleurs visibles en salle.
Les grands crus de boeuf à La Table du Boucher
Les races de boeuf proposées à la Table du Boucher changent avec les années. J’y ai déjà dégusté de la bazadaise, de la holstein (le chef était un précurseur sur cette race laitière et passait à l’époque pour un fou d’en servir à table), du black angus, du wagyu, de la normande, de la black Onyx,…Pour ce repas, l’idée était de comparer des pièces de boeuf, de la plus répandue Holstein (en bas à gauche) à la plus rare Kobé (en bas à droite) en passant par la Hereford (en haut à droite) et la Blackmore (en haut à gauche).
En bas à gauche se trouve le fameux boeuf de Kobé. Comme l’explique un article du journal L’Echo, c’est la quintessence de la pièce de boeuf : « Boeuf de Kobé. On en parle beaucoup, mais peu en ont mangé. Pour de nombreux amateurs, il s’agit de la meilleure viande de boeuf au monde. Il est cher et il est rare. Rare? « Seulement de 16 à 24 bêtes sont exportées mensuellement pour toute l’Europe »….Son prix? Attention les portefeuilles…: 348 euros le kilo pour le contre-filet et 394 pour le filet pur ». On le surnomme parfois le Louis Vuitton de la viande.
Ce Kobé, à ne pas confondre avec le wagyu, est une viande exceptionnelle élevée dans la préfecture de Hyogo au Japon suivant un cahier des charges très strict. Tout est mis en place pour que le boeuf produise un maximum de graisse et en brûle un minimum. On cherche à lui éviter tout stress (certains éleveurs allant jusqu’au massage et jusqu’à la diffusion de musique classique), on ne veut pas qu’il se fatigue et on évite qu’il subisse un écart de température.
La nourriture est également soigneusement sélectionnée, principalement à base de céréales et non pas à base de fourrages, ce qui leur confère un gras blanc et doux. Certains éleveurs leur donnent même de la bière (pour les vertus des levures ou pour ouvrir l’appétit des vaches).
Toutes les bêtes d’un cheptel ne donnent pas lieu au label Kobé. Il faut, en sus, constater un persillage minimum.
L’umami du boeuf de Kobé
La photo ci-dessus ne laisse planer aucun doute : cette marbrure magnifique est la signature du Kobé. On pourrait avoir peur d’un excès de gras mais il n’en est rien. Ce gras, magnifiquement distribué dans la viande, fond en grande partie lors de la cuisson. C’est lui qui diffuse véritablement tout son goût à la viande.
Un petit morceau suffit à comprendre ce qui rend cette viande unique : l’umami y est à son paroxysme. Ce « cinquième goût » est courant sur les viandes maturées cuites au charbon ou à la flamme (cette cuisson décompose les protéines et il en ressort, entre autre, la molécule appelée L-glutamate qui est responsable de l’umami). Mais sur le Kobé, la puissance est décuplée. Le goût reste assez délicat et fin. On pourrait s’attendre à quelque chose de très puissant mais c’est tout le contraire. On ressent plutôt énormément de finesse mais avec une longueur en bouche impressionnante. C’est difficile à décrire car c’est un peu antinomique. C’est une expérience à vivre.
La texture est également très particulière. La viande est littéralement fondante en bouche. Elle ne nécessite quasiment pas d’être mâchée et on pourrait presque parler d’une texture proche de celle du beurre ou du foie gras.
Ce n’est donc pas étonnant que les Japonais raffolent tant de cette viande car elle est unique. Après, en toute honnêteté et le budget entrant en ligne de compte, je ne vais probablement pas réitérer cette expérience de façon fréquente. La qualité est maximale mais le rapport qualité-prix n’y est pas.
La viande Blackmore et la Holstein
La BlackMore est la Rolls-Royce du wagyu australien. A la Table du Boucher, elle est disponible à 23 euros les 100g.
On est donc dans la même catégorie de race que le Kobé mais le terroir n’est pas le même et la cahier des charges pour l’élevage non plus. C’est une viande délicieuse dont la saveur se rapproche un peu du Kobé mais ce n’est clairement pas du Kobé. L’umami est moins développé et la longueur en bouche plus courte. La texture, fondante, est par contre assez proche de celle du Kobé.
En parallèle fût servi la Holstein maturée. On est dans deux viandes différentes. La Holstein a plus de mâche (mais reste très tendre), moins d’umami et un goût plus proche de celui de la noisette. Cette Holstein, c’est vraiment le tout beau rapport qualité-prix. A 10 euros les 100 grammes, c’est un plaisir garanti ! C’est la viande que je conseillerais pour une première approche.
La Hereford
Enfin, en quatrième viande, il y avait du boeuf Irlandais : Hereford. C’est le morceau qui m’a semblé le moins attractif : mâche plus prononcée et maturation qui se ressent nettement moins (je ne sais d’ailleurs pas si elle était maturée). Mon sentiment est que c’est une bonne pièce de viande, comme on pourrait en trouver dans une très bonne boucherie, mais en dessous des trois autres viandes de la soirée.
D’autres viandes à La Table du Boucher
C’est vrai que la viande emblématique de la Table du Boucher, c’est le boeuf. C’est là qu’on attend le chef et c’est là qu’on le rencontre avec un grand sourire aux lèvres. Mais, si on s’aventure un peu en dehors des sentiers battus, d’autres belles surprises sont au rendez-vous. Lors de mon précédent repas, j’avais goûté ce très bon agneau Allaiton de l’Aveyron, jus au thym, garniture de légumes
Les autres beaux produits à la Table du Boucher
Il y a deux ans, la saison à peine commencée, la Table du Boucher proposait de belles Saint-Jacques. En particulier avec ce produit, la cuisson est très importante. Il faut parvenir à ce que la surface extérieure soit bien saisie sur une faible épaisseur tout en s’assurant que les chairs restent nacrées à coeur et que le tout soit bien chaud. La texture de la Saint-Jacques doit également être ferme et présenter une certaine mâche. Si elle est trop molle, c’est qu’on est sans doute en présence de pétoncles ou de Saint-Jacques surgelées de piètre qualité. A la Table du Boucher, on ne transige ni sur la cuisson (qui est parfaite) ni sur le produit (qui est de belle qualité). Avec un peu de truffe (remarquez bien ce que le chef appelle un peu), le bonheur est au rendez-vous.
C’était il y a deux ans mais je tenais à souligner que Luc Broutard ne propose pas que de la viande à la Table du Boucher. Et que, surtout, il maîtrise aussi les cuissons des produits de la mer.
Le cadre de La Table du Boucher
Le cadre du restaurant est en phase avec le style culinaire de brasserie.
A gauche, les spécialistes auront remarqué une trancheuse de luxe. J’ai déjà assisté à son utilisation pour des découpes minutes de jambon.
En conclusion
Pour comprendre la Table du Boucher, il faut comprendre l’histoire de son chef emblématique : Luc Broutard. Son papa était fermier et c’est de là que provient son goût immodéré pour une viande de qualité. Non pas une bonne viande mais une viande exceptionnelle, une viande qu’il appelle « Grand Cru ». C’est devenu son leitmotiv à tel point que s’il ne trouve pas le produit d’exception qui correspond à ses souvenirs d’enfance, il n’en propose pas à la carte.
Si vous aimez les espumas, mousses et autres textures gélifiées, passez votre chemin. A supposer que vous recherchiez une assiette « œuvre d’art », ce n’est pas ici que vous la trouverez. Si les assiettes bling-bling vous emballent, vous vous êtes trompés d’adresse. Et si le cadre, les nappes blanches, les cloches et les gants blancs sont indispensables à votre repas, allez manger ailleurs. Bref, si vous aimez « la branlette gastronomique », vous êtes à la mauvaise adresse. Mais si l’envie vous prend de déguster une viande d’exception, parfaitement mise en valeur et servie avec sympathie et décontraction (merci Ophélie), voilà une adresse incontournable et mon coup de coeur du genre.
La cuisine est souvent le reflet de son chef. Fidèle à ses origines Chti, Luc Broutard est une personne généreuse et conviviale, le coeur sur la main et animé par la volonté de faire plaisir avec une réelle sincérité. Le restaurant la Table du Boucher à Mons est le temple de la viande. Son grand prêtre, Luc Broutard, ferait aimer la viande à un végétarien.
Localisation de La Table du Boucher
Lien vers le site web
https://www.latableduboucher.be
Menu de la Table du Boucher
Carpaccio de boeuf Holstein, poutargue de caviar et huile d’olive extra vierge
Caviar impérial gold sur tartare de boeuf de Salers
Quelques pièces de boeuf grand cru
Côte de boeuf Holstein maturée et côte de boeuf Blackmore maturée
Boeuf de Kobé
Côte de bœuf Hereford
Le baba au rhum, rhum des trois rivières, glace vanille de Tahiti
Dame blanche, chocolat chaud, crème fraîche
Quelques photos
D’autres repas à la Table du Boucher
30/08/2018 : https://www.passiongastronomie.be/2018/08/restaurant-latableduboucher-mons-broutard/
07/10/2017 : https://www.passiongastronomie.be/2018/08/restaurant-latableduboucher-mons
17/01/2015 : https://www.passiongastronomie.be/2015/01/la-table-du-boucher/
27/07/2015 : https://www.passiongastronomie.be/2015/07/la-table-du-boucher-2/
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