Restaurant Bienvenue chez Vous à Namur par Cédric Delsaux à Namur
Aller manger chez Bienvenue chez Vous de Cédric Delsaux est une expérience que j’apparente à un assister à one-man show de la restauration. C’est relativement unique de ne retrouver au restaurant qu’une seule personne qui s’occupe de tout : accueil, sommellerie, cuisine, service,…. Cédric Delsaux est donc un peu le Rémy Bricka de la cuisine, la modernité en plus.
Qui dit une expérience, dit sortir des sentiers battus. Il ne faut donc pas s’attendre à arriver dans un restaurant classique où on choisit son menu, ses plats et ses vins à la carte. Au restaurant Bienvenue chez Vous, ce n’est pas le client qui va au chef mais le chef qui propose au client sa cuisine et les vins (ou bières) qu’il a choisi pour l’accompagner.
Autre trait caractéristique du restaurant Bienvenue chez Vous : la volonté du chef de travailler des produits locaux et d’artisans. Car le but est double : faire découvrir son savoir-faire au travers de sa cuisine mais aussi les produits de la région.
La chose la plus étonnante, c’est qu’il est seul. Certes le restaurant Bienvenue chez Vous ne compte que quatre tables qui prennent d’office le même menu et en même temps. Certes il y a un fameux travail de mise en place et beaucoup de préparation qui se traduit par beaucoup de plats froids. Mais aucunes des assiettes proposées n’est simple, simpliste ou simplissime.
C’est même plutôt le contraire : elles sont hyper-travaillées et complexes et le visuel est d’un tout bon niveau artistique. Peut-être l’influence de Sergio Hermann, le chef de Oud Sluis, qu’il affectionne particulièrement et chez qui il avait encore mangé la veille ? C’est donc une véritable performance que fournit le chef à ses clients.
Enfin ce n’est pas parce qu’on est seul à travailler dans le restaurant qu’on doit courir de table en table. Le chef est particulièrement bien organisé et prend le temps d’expliquer ses plats et de discuter avec chaque table.
Cédric Delsaux insuffle véritablement une ambiance zen, prend son temps entre les plats pour permettre aux clients de digérer et faire durer le plaisir. Et son plaisir en cuisine n’est pas feint. C’est ainsi qu’on le surprend à l’occasion en train de fredonner quelques paroles sur la musique d’ambiance.
Point de vue prix pour un repas au restaurant Bienvenue chez Vous, la formule confort all-in (apéritif, eau, vins, café, thé…) est au prix de 92€. Quand on voit le nombre de plats et la complexité des assiettes, on peut dire qu’il s’agit d’un beau rapport qualité-prix, surtout pour un restaurant de ce niveau (noté 16/20 au Gault & Millau).
Au final, je dirais que manger au restaurant Bienvenue chez Vous est une expérience vraiment intéressante mais à réserver aux personnes qui aiment la cuisine complexe et les textures multiples et variées. C’est un style assumé, maîtrisé et réussi où le produit est travaillé et transformé. Peut-être donc un peu à contre-courant de la mode actuelle qui se recentre sur le produit et dé-complexifie les assiettes.
Il en faut pour tout les goûts, le mien allant peut-être vers quelque chose de plus simple (ceci est juste l’expression de mes préférences et pas un jugement du niveau de qualité du chef), mais je m’incline devant ce chef qui a choisit son concept et le réussit parfaitement.
Au final j’ai été très content de cette expérience et de la gentillesse du chef que je ne connaissais pas.
LIEN
http://www.restobienvenuechezvous.com
LOCALISATION
MENU
Apéritif maison : cava et crème de violette. Le dosage de crème de violette est léger donnant donc un apéritif peu sucré, ce qui est clairement ma préférence.
Mise en bouche : déclinaison de carottes crues, marinées au vinaigre de miel et huile de sésame, fromage frais, fleur de cosmos. Les carottes proviennent du maraîcher Daniel Leblond. Pas étonnant qu’elles soient délicieuses. Une mise en bouche tout en fraîcheur et dont le visuel marque d’emblée le niveau.
Mise en bouche : Cheddar, mimolette, tapenade d’olives et shiso pourpre
Mise en bouche : Tomates-crevettes grises tout autrement, crumble de bacon et jus acidulé. Excellent.
Mise en bouche : Saumon en cuisson douce et tendre très légèrement fumé à chaud, condiment avocat menthe fraîche, fraîcheur concombre et végétaux marins
Mise en bouche : Feuille d’huitre végétale et caviar de hareng fumé. Une belle association de « caviar » de hareng avec cette fleur (Mertensia Maritima) qui dégage en bouche des arômes d’huitre à tel point qu’on se tromperait à l’aveugle.
« De toutes les couleurs. Textures, saveurs, fraîcheur » : Déclinaison de tomates (de variétés anciennes en direct du producteur) : zébra, noir de crimée, rose de Berne, cerise, cœur de bœuf, gel caramel-Kriek, fraîcheur tomate-crique. Une jolie ode aux dernières tomates de la saison et un gel sucré de caramel et bière Kriek. Et quelle boisson propose le chef pour accompagner ce plat ? Une bière Kriek bien sûr !
« Un jambon beurre ? un peu l’esprit…revisité » : Jambon fermier cru et cuit dans l’idée d’un sandwich jambon-beurre revisité : mousse onctueuse de jambon cuit, copeaux de jambon cru, chiconette à l’huile d’Argan et embeurrée d’arachides salées
« Du suave. Oui, mais autrement » : Foie gras tout autrement en différentes textures : Ganaché de foie gras confit aux épices, pralin de foie gras de canard et foie gras mi-cuit, peps sauce soja-wasabi, fleurs d’apple blossom, carvi en biscuit croustillant, pomme verte. Un véritable festival de textures qui s’alternent en bouche. Le chef conseille ce prendre régulièrement de la pomme qu’on laisse fondre sur le palais pour le rafraîchir et c’est en effet la meilleure façon de manger ce plat.
« Hummm, la coquille. Des goûts de sous-bois » : Saint-Jacques, Cèpes, Mousseline, truffe d’automne, capucine, frigolite de crustacés, fleurs de tagettes. Une cuisson parfaite de la Saint-Jacques (saisies et dont les chaires restent nacrées à cœur) et une truffe pas trop odorante pour préserver les arômes de la Saint-Jacques. Et bien sûr toujours du jeu sur les textures.
« Coin Coin. Gourmandise, puissance et acidité » : Canard Colvert juste rôti, pointe d’épices Vadouvan, oignons rouges, poireaux caramélisés, shiso, jus acidulé aux framboises. Ici, on a clairement un gibier au goût sauvage (plus faisandé). Rien à voir avec les gibiers d’élevage qu’on libère peu de temps avant la chasse et qui ont très peu de goût. L’acidité de la sauce (à base de framboise et de jus de cuisson je pense) vient bien à point pour emballer la force du goût de la viande.
Cuisse de Canard Colvert mijotée, chou Romanesco. J’adore toujours quand le chef sert le même ingrédient en plusieurs déclinaisons.
« Telle une comète. Délicat, frais…tout en douceur » : Citron, dés d’ananas, toast Speculoos, sucre muscovado à la mélasse, point d’aneth, fromage frais. De fait, un magnifique visuel qui rappelle une comète.
Sorbet au Yuzu, yahourt. Très rafraichissant pour terminer
PHOTOS